Nous avions rencontré Romain d’Huissier, l’auteur des Chroniques de l’étrange (Les 81 Frères, dont nous avions parlé ici, et le 2ᵉ tome La Résurrection du Dragon) lors des 13ᵉ Rencontres de l’Imaginaire en novembre dernier. Voici l’interview mise à jour, puisqu’on l’a rencontré entre temps pendant le festival imJn’ère à Angers les 8 et 9 avril 2017. Il nous parle un peu de jeu de rôle, d’Urban Fantasy, des Chroniques de l’étrange et de son 3ᵉ tome à venir, et bien sûr de Hong Kong !
Bonjour Romain, pourrais-tu te présenter en quelques mots ?
Romain d’Huissier : Bonjour, je suis romancier et auteur de jeux de rôle et d’évènements. Dans la « vraie vie », je suis responsable qualité dans une association d’aide aux handicapés, ce qui me permet de m’adonner en parallèle à ma passion pour l’écriture.
Tu as donc commencé par les jeux de rôle ?
RdH : Oui, c’est un loisir qui pousse à la création personnelle, puisqu’on écrit soi-même ses scénarii, ses propres règles et univers. J’ai eu la chance, de rencontre en rencontre, de pouvoir être édité professionnellement. J’étais déjà dans des univers chinois, parce que le premier jeu de rôle que j’ai publié était Qin, Les Royaumes Combattants, qui se passe à l’époque du premier empereur. J’ai ensuite enchaîné avec divers éditeurs. Avec des collaborateurs (notamment Julien Heylbroeck, interview à venir), j’ai signé l’adaptation de La Brigade Chimérique en jeu de rôle. Et cela a fait le lien vers la littérature, j’ai eu l’occasion de fréquenter Serge Lehman et Fabrice Colin (les scénaristes de La Brigade Chimérique, ndlr), qui m’ont donné envie de me lancer dans l’écriture de roman.
Es-tu passé directement des jeux de rôle aux Chroniques de l’étrange ?
RdH : Non, j’ai répondu à des appels à textes, j’ai écrit quelques nouvelles qui ont été acceptées dans des anthologies aux éditions Malpertuis ou Rivière Blanche. J’ai d’ailleurs écrit 2 romans chez Rivière Blanche, Le Carnoplaste, et Trash, avant que les éditions Critic acceptent mon manuscrit des Chroniques de l’étrange en 2014. Le premier tome, Les 81 Frères, est sorti en 2015 (le 2ᵉ tome, La Résurrection du Dragon est sorti fin 2016 et a été sélectionné pour le prix du festival des Imaginales 2017, ndlr)
Peux-tu nous parler des 81 Frères ?
RdH : J’avais envie de faire de l’Urban Fantasy, car c’est un genre que j’aime beaucoup. Mais c’est difficile de trouver son originalité dans ce milieu, entre Les Dossiers Dresden (The Dresden Files) qui est très connu, et le « Bit-Lit » (Urban Fantasy plus légère) qui marche sur le même créneau.
J’en suis finalement revenu à ma passion pour la Chine, en utilisant le bestiaire de là-bas, au lieu des classiques loups-garous ou vampires, en mêlant ça avec des magiciens modernes, le tout à Hong Kong, qui est une ville très cinématographique. Cela donne Johnny Kwan, un héros à la John Woo, qui se bat aussi bien à l’épée qu’avec des flingues magiques, et qui affronte des créatures que nous occidentaux n’avons pas l’habitude de voir dans notre folklore.
Es-tu déjà allé en Chine ?
RdH : Non, jamais en Chine, ni à Hong Kong (rires). C’est vraiment une passion, et j’ai énormément lu sur le sujet, mais je n’ai malheureusement jamais eu l’occasion d’aller là-bas. Peut-être que si je vends suffisamment de livres…(rires)
La ville de Hong Kong est plutôt bien retranscrite dans les 2 premiers livres. Quel est le travail de fond pour bien réussir à le faire, puisque tu n’y es jamais allé ?
RdH : On a la chance de vivre à l’ère d’internet. L’avantage de Hong Kong, c’est que c’est une ville bilingue, puisqu’étant une ancienne colonie anglaise. Ils ont donc des sites en anglais sur tout. Si j’ai besoin de savoir comment fonctionne leur police, il y a le site de la police de Hong Kong, avec les organigrammes, et même le pdf à télécharger pour passer le concours d’entrée. Idem pour les morgues que je cherchais, avec la carte, les photos des lieux, etc. Il y a aussi évidemment le cinéma Hongkongais, qui permet de voir la ville et la manière dont les habitants la ressentent. Enfin, j’ai la chance d’avoir un ami qui est expatrié là-bas avec sa famille, et je peux donc lui poser des questions sur le quotidien. Il m’a beaucoup aidé.
Le personnage principal se nomme Johnny Kwan, qui est-il ?
RdH : C’est un héros traditionnel, à la fois magicien (magie taoïste) et enquêteur à Hong Kong. Il fait partie de cette communauté d’exorcistes chinois qui veille sur les créatures surnaturelles. Un détective privé du surnaturel en quelque sorte. Il n’est pas extrêmement puissant, et doit compenser cela par son ingéniosité, sa débrouillardise, sa collaboration avec des alliés et l’utilisation de sorts utilitaires. Il est aussi assez gourmand, puisqu’à chaque fois il s’arrête dans un restau…Il faut savoir qu’Hong Kong est la ville où il y a le plus de restaurant par habitant au monde. Les gens mangent énormément au restaurant, plus que chez eux, et j’ai voulu mettre ça en avant dans le livre.
Le 2ᵉ tome des Chroniques de l’étrange, La résurrection du Dragon, est sorti en novembre dernier. Est-ce une suite directe ?
RdH : Oui. À la fin du 1er tome, Johnny Kwan boucle son enquête, mais des questions restent en suspend. Ce 2ᵉ tome répond à certains mystères tout en en rajoutant d’autres.
C’est un peu L’Empire contre-attaque de ma trilogie, où des secrets sont révélés, les vrais méchants apparaissent, et il faudra lire le dernier tome pour avoir la conclusion.
Quelle est ta méthode d’écriture ?
RdH : Je suis un auteur structurel, je pars donc d’un plan, un début, une fin, les différentes étapes en chapitres, avec des post-it, sous forme de frise chronologique. Ensuite je ré-organise tout ça pour voir ce qui est le plus cohérent dans la narration. Je ne m’interdis pas l’improvisation, et je me laisse des fois guider si j’ai une idée entre-temps, mais je ne pars jamais sans savoir où je vais. Je sais ce que chaque chapitre va raconter, même si je ne sais pas forcément comment.
Quelles sont tes relations avec les éditions Critic ?
RdH : Au début je les ai maudits (rires), parce que j’avais écrit le premier tome au présent, pour un certain dynamisme de l’action. Le comité de lecture m’a dit que le roman était vraiment sympa, mais qu’il fonctionnerait mieux au traditionnel passé simple / imparfait. Je l’ai donc réécrit entièrement au passé, avec la concordance des temps, les expressions, etc. C’était un casse-tête.
Au-delà de ça, il y a eu un vrai travail de fond avec l’éditeur. Ils m’ont fait l’honneur d’une présentation de luxe du livre, couverture cartonnée et illustration de Xavier Collette, comme leur précédent titre American Fays (d’Anne Fakhouri et Xavier Dollo, alias Thomas Geha). Je ne peux vraiment pas me plaindre, car ils m’ont donné toutes les chances d’être remarqué sur les étals !
Et le 3ᵉ tome ?
RdH : Il est en cours, le titre sera Les Gardiens Célestes. Il résoudra tout ce qui a été laissé en suspend dans La Résurrection du Dragon, avec toujours plus d’action, d’enquête, de mystère et de magie.
Est-ce que tu as d’autres projets en cours ?
Romain d’Huissier : Je travaille actuellement avec Black Book Editions (un éditeur de jeu de rôle, ndlr) sur l’adaptation en jeu de rôle d’un jeu de figurine qui s’appelle Mythic Battles: Pantheon, financé via Kickstarter. Je n’ai pas d’autres projets pour l’instant, car ça me prend déjà beaucoup de temps.
Propos recueillis par Thomas Leroux et Gillen Azkarra lors des 13ᵉ Rencontres de l’Imaginaire à Sèvres, le 26 novembre 2016, et imaJn’ère les 8 et 9 avril 2017.
Un grand merci à Romain d’Huissier pour sa gentillesse.