Blade Runner refait parler de lui depuis que la suite du film culte de Ridley Scott a été annoncée, et sort le 4 octobre 2017 en France. En attendant de voir ce nouveau film prometteur réalisé par Denis Villeneuve, pourquoi ne pas découvrir / redécouvrir le matériau d’origine, la nouvelle de Philip K. Dick !
En 1992, suite à la Guerre Mondiale Terminus, la plupart des humains ont émigrés sur les colonies de Mars. Seuls les « spéciaux » ou débiles, n’ont pas le droit de quitter la Terre. L’air étant contaminé de particules radioactives, la plupart des espèces vivantes ont disparu, mais on peut, par empathie, et en l’échange de fortes sommes, acheter des animaux artificiels, dit « électriques ».
Rick Deckard, un chasseur d’androïdes illégaux à San Francisco, aussi appelé un « blade runner », reprend le dossier de son supérieur blessé en mission : Il doit réformer 6 androïdes du nouveau modèle Nexus-6 entrés illégalement sur Terre…
Les androïdes rêvent-ils de moutons électriques ? (Do Androids Dream of Electric Sheep ?) est une nouvelle d’un peu plus de 200 pages, parue en 1968 aux USA (1976 en France).
À travers la quête de Rick Deckard, Philip K. Dick remet en question la notion même de ce qu’est l’être humain. Une grande place est accordée à l’empathie, principal élément qui différencie les humains des androïdes (le terme « Réplicant » n’existant que dans le film), puisque ces derniers n’en ressentent aucune ! Dans ce monde devenu froid et déshumanisé, ceux qui restent, à l’image de John Isidore, un « spécial », en sont réduits à regarder l’émission de variété de Buster, un présentateur qui semble être à l’antenne de manière perpétuelle. Ils se réfugient aussi dans un culte, le Mercerisme, venant de Wilbur Mercer, dont la condamnation à grimper éternellement une colline fait penser à celle du mythe de Sisyphe, mais renvoie bien entendu aussi au chemin de croix de Jésus de Nazareth. Grâce à une « boîte à empathie », les adeptes fusionnent mentalement avec Mercer, pour former le temps d’un instant, une conscience collective. Il existe aussi un orgue d’humeur « Penfield », permettant de délivrer un état d’esprit que l’on souhaite avoir, un peu à la manière d’une drogue.
La grande réussite de Les androïdes rêvent-ils de moutons électriques ? est justement de fusionner cette remise en question de l’identité humaine avec l’aspect polar / thriller, teinté de paranoïa ambiante. Bien que Deckard passe à l’action lorsqu’il le faut, ce ne sont pas les moments les plus marquants, et il privilégie surtout le verbe. Le test Voigt-Kampff (permettant de déterminer si une personne est un androïde) qu’il fait passer à Rachel, nièce du fabricant des Nexus-6, en est un très bon exemple ! Certains chapitres sont emprunts d’onirisme, de nostalgie, ou même d’humour, à l’image des animaux électriques, compagnons discrets mais ô combien importants pour Deckard ou Isidore.
Remettant régulièrement en question la nature même de ses personnages, on finit par se prendre d’empathie pour eux, y compris les androïdes. Une chose est sûre en tout cas, c’est qu’on est bel et bien humains !
Conclusion
Il y aurait tellement de choses à dire sur cette nouvelle qu’on ne peut pas tout résumer en une seule chronique. Avec une écriture impeccable, s’adaptant parfaitement à ses personnages, Philip K. Dick propose avec Les androïdes rêvent-ils de moutons électriques ? une nouvelle intelligente et prenante, avec de nombreux rebondissements bien amenés. Si vous ne l’avez jamais lue et ne connaissez que le film de Ridley Scott, Blade Runner, foncez !
Pour réussir le test Voigt-Kampff
|